Émilie Counil
chargée de recherche à l’Ined, effectue des recherches autour des inégalités sociales de santé.
(Entretien réalisé en avril 2019)
Quels sont vos axes de recherche ?
J’étudie les inégalités sociales de santé, et, plus particulièrement, le rôle des déterminants professionnels et environnementaux dans la construction de ces inégalités. Si certains déterminants sont déjà relativement bien connus et pris en compte par les pouvoirs publics - comme le recours au système de santé ou encore le suivi des recommandations en matière de tabagisme -, d’autres demeurent beaucoup moins visibles. La santé au travail et la santé environnementale constituent des problématiques imbriquées : le plastique, par exemple, a non seulement des effets sur la santé des travailleurs qui le manipulent, le transforment, mais aussi sur celle des consommateurs qui l’utilisent. Or, une approche catégorielle est souvent employée, ce qui génère alors une somme de connaissances fragmentées. Les phénomènes sont multi-facettes ; ainsi, les risques professionnels peuvent à la fois renvoyer à des nuisances sonores et à des risques psycho-sociaux. En dépit d’une production scientifique dense, il est difficile de recomposer une image globale.
Épidémiologiste de formation, vous avez rejoint l’Ined en septembre 2018. Quels sont les projets sur lesquels vous allez travailler ?
Si l’épidémiologie permet d’examiner les faits facteur par facteur et constitue une étape souvent considérée comme incontournable pour établir les liens de causalité, elle présente aussi de nombreuses limites. Travailler avec la démographie et la sociologie permet d’apporter d’autres éclairages sur les processus à l’œuvre. Je poursuis mes recherches sur les inégalités sociales de cancer en lien avec le travail et l’environnement, avec pour objectif d’élargir à d’autres problèmes de santé. Mon arrivée à l’Ined me donne la possibilité non seulement de poursuivre sur la voie de la pluridisciplinairité, mais aussi d’accéder à des données recueillies à l’échelle nationale, qui offrent des compléments d’information, y compris sur l’articulation vie personnelle - vie professionnelle, essentielle pour comprendre les inégalités sociales, notamment de genre, en matière de santé.
Faire le pont entre différents domaines de recherche nous conduira à une meilleure connaissance de la construction des inégalités de santé, ainsi qu’à la production d’indicateurs plus fins.