Ankit Sikarwar
Ankit Sikarwar, post-doctorant à l’Ined, a reçu le prix du meilleur poster lors du colloque de l’European Population Conference (EPC), qui s’est tenu du 12 au 15 juin 2024 à Édimbourg.
(Interview réalise en juin 2024)
Pouvez-vous expliquer le sujet de votre poster ?
Ce poster met en lumière les principaux résultats de nos travaux menés récemment à l’INED sur les pressions environnementales multiples. En s’appuyant sur des données géospatiales en libre accès, notre étude identifie des zones soumises à plusieurs charges environnementales extrêmes telles que la pollution de l’air, l’augmentation de la température, la sécheresse et le manque de végétation. Nous déterminons également le nombre de personnes vivant dans ces zones sous pression avec une grille divisée en cellules d’un kilomètre et des mesures s’étendant sur deux décennies. Et surtout, nous avons adopté des seuils critiques pour mesurer les risques environnementaux qui s’écartent des normes les plus couramment utilisées à l’échelle mondiale. Notre recherche aborde également une question cruciale : l’exposition accrue aux pressions environnementales multiples est-elle due à la croissance démographique, à l’expansion des zones sensibles sur le plan environnemental, ou aux deux ? Vous trouverez plus de détails sur ces travaux dans un article publié en avril dans une revue en accès libre.
Pourquoi avoir choisi de travailler sur ce sujet ?
Originaire d’une petite ville indienne ayant connu des bouleversements environnementaux liés aux activités touristiques non planifiées, j’ai toujours été intéressée par l’étude du lien complexe entre population et environnement. J’ai effectué mes premiers travaux académiques avec des données issues de l’imagerie spatiale et la modélisation géospatiale pendant mes études de master. J’ai cherché à comprendre les méthodes les plus efficaces pour analyser les données d’images satellites non conventionnelles. Au fil des ans, j’ai non seulement appris à utiliser ces données et techniques géospatiales pour mes propres recherches, mais j’ai aussi transmis ces compétences par le biais d’activités d’enseignement et de formation au niveau international.
Outre mon intérêt pour la recherche géospatiale, ce thème particulier – les pressions environnementales multiples – provient aussi d’expériences personnelles acquises lors de visites de terrain dans les bidonvilles de Mumbai, dans le cadre d’activités bénévoles effectuées au début de mes études de master et de doctorat. J’y ai observé et rencontré des personnes vivant à côté d’une décharge et confrontées à plusieurs problèmes environnementaux : la fumée dégagée par la combustion des ordures, les pénuries d’eau, l’habitat informel et l’insalubrité. J’ai été surpris par la façon dont ils ont su intégrer ces contraintes au quotidien. Depuis, j’ai toujours voulu étudier ces enjeux et apporter une contribution scientifique dans ce domaine. Partout dans le monde, le changement climatique et les événements extrêmes s’intensifient et affectent le bien-être et la santé. Les populations vulnérables (comme celles qui vivent dans les bidonvilles) souffrent davantage des effets négatifs, car elles sont moins à même de relever et surmonter ces défis. En tant que chercheur, je pense qu’il est nécessaire de mettre en place des politiques ciblées et de prendre des mesures urgentes pour atténuer ces impacts. Cette étude pose les jalons d’une identification empirique des populations menacées par les pressions environnementales multiples. En outre, mon travail avec Valérie Golaz et les échanges avec les membres de l’unité de recherche Demosud ont constitué pour moi des expériences d’apprentissage cruciales sur l’Afrique subsaharienne.
En quoi ce prix contribuera-t-il à votre carrière ?
Ce prix est d’autant plus important à mes yeux que j’ai été sélectionné parmi 74 posters de recherche de très grande qualité. Il m’a donné l’occasion de discuter de mes idées avec des chercheur-e-s internationaux. Pour moi, il s’agissait avant tout d’attirer l’attention de la communauté scientifique sur les pressions environnementales multiples, et j’espère que ce prix aura contribué à montrer la pertinence de ce concept pour les chercheur-e-s du monde entier. Pour ce qui est de ma carrière, cette reconnaissance s’inscrit dans la continuité de mes premiers travaux. Cela vient étoffer mes références tout en ouvrant d’autres possibilités de collaboration et d’impact dans mon domaine. Je suis plus enthousiaste que jamais à l’idée d’approfondir mes recherches.