Voiture ou poupée ? Le rôle des frères et sœurs dans les jeux genrés des enfants
Quels jeux préfèrent les filles et les garçons à l’âge de deux ans ? Les pratiques ludiques des enfants reflètent-elles les influences familiales ou sociales ? S’appuyant sur les données de l’enquête Elfe (Étude longitudinale française depuis l’enfance), les auteurs de ce nouveau numéro de Population & Sociétés publié par l’Ined explore le rôle des fratries, des parents et du milieu social dans les pratiques de jeux genrées des enfants.
Des jouets différenciés dès un an, des écarts marqués à deux ans
Dès leur première année, les enfants disposent de jouets largement différenciés selon leur sexe. À deux ans, les pratiques ludiques des filles et des garçons sont déjà marquées par des écarts significatifs. Ainsi, 81 % des filles jouent fréquemment à la poupée, contre seulement 24 % des garçons, tandis que 89 % des garçons jouent avec des petites voitures, contre 35 % des filles . Des activités comme le dessin (pratiqué par 73 % des filles contre 58 % des garçons) ou les jeux de balle (76 % des garçons contre 57 % des filles) présentent des écarts moins prononcés. Ces différences révèlent des pratiques genrées dès le plus jeune âge. Elles sont observées dans toutes les classes sociales.
L’impact des fratries : quand les aînés influencent les cadets
L’étude met en lumière le rôle clé des fratries mixtes dans la réduction des stéréotypes genrés de jeux. Les garçons cadets ayant une ou des sœurs aînées jouent à la poupée à hauteur de 33 %, contre seulement 9 % pour ceux ayant uniquement des frères. Les filles cadettes ayant des frères aînés sont 46 % à jouer aux petites voitures quasi quotidiennement, contre 26 % pour celles ayant uniquement des sœurs . Cet « effet d’entraînement » est amplifié lorsque les aînés jouent régulièrement avec les plus jeunes.
Le rôle des pères et des mères : des influences différenciées
Les parents, et les mères davantage que les pères, jouent un rôle non négligeable dans la diversification des pratiques ludiques des enfants. Les garçons dont la mère participe activement à leurs jeux sont 7 points de pourcentage plus nombreux à s’intéresser aux poupées, tandis que les filles augmentent de 8 points leur intérêt pour les petites voitures lorsqu’elles jouent régulièrement avec leur mère Ces interactions parent-enfant influencent les pratiques genrées mais leur influence est moindre que celle des grands frères et sœurs.
À propos des données de l’enquête Elfe L’enquête Elfe (Étude Longitudinale Française depuis l’Enfance), organisée par une unité mixte entre l’Institut national d’études démographiques (Ined), l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et l’Établissement Français du Sang (EFS), constitue une précieuse source de données pour analyser les dynamiques familiales et sociales. Cette cohorte, qui suit 18 000 enfants depuis leur naissance en 2011, explore divers aspects de leur vie, incluant leurs caractéristiques individuelles, familiales et sociales. Les données de cette étude, représentative à l’échelle nationale, proviennent des réponses recueillies auprès des parents par questionnaire lorsque leurs enfants avaient environ deux ans. L’échantillon analysé ici comprend 12 990 enfants de deux ans dont 51 % de garçons et 49 % de filles. Pour en savoir plus : https://www.elfe-france.fr/ |
Source : Abigail Bourguignon, Kevin Diter, Holly Hargis, Wilfried Lignier, Hélène Oehmichen, Julie Pagis, Julien Vitores (2025). Voiture ou poupée ? Le rôle des frères et sœurs dans les jeux genrés des enfants, Population et Sociétés, n° 630
Mise en ligne : février 2025