La fécondité des hommes est-elle supérieure ou inférieure à celle des femmes ?
L’article de Conjoncture démographique 2023 de l’Ined a mis l’accent sur les écarts et sur les dynamiques des indicateurs selon le sexe des personnes. Parmi les évolutions observées, celles relatives à la fécondité des hommes comparée à celle des femmes. En 2021, l’âge moyen à la parentalité est de près de trois ans plus élevé chez les hommes, ce qui fait écho à la différence d’âge au moment de la mise en couple. L’indicateur conjoncturel de fécondité des hommes est supérieure à celui des femmes et cela depuis 2010 (1,87 pour les hommes contre 1,84 pour les femmes en 2021), mais la descendance finale des hommes nés en 1961 (1,96) est légèrement inférieure à celle des femmes de la même génération (2,09).
La fécondité des hommes a dépassé celle des femmes
En France, l’indicateur conjoncturel de fécondité (somme des taux de fécondité par âge d’une année, appelé « ICF ») était de 1,87 enfant par homme et 1,84 enfant par femme en 2021 (figure 1A). Mesurée sur la même plage d’âges (18-50 ans), la fécondité des hommes est égale à celle des femmes, et ce depuis 2014. Cependant, pour des raisons biologiques et sociales, les périodes de fécondité diffèrent entre les deux sexes : si l’on prend en compte l’ensemble de la vie féconde des hommes (18-60 ans) et pour les femmes (15-50 ans) on constate que la fécondité masculine dépasse celle des femmes depuis 2010, principalement du fait de la fécondité masculine au-delà de 50 ans. Cette différence est aussi possible du fait du décalage d’âge à la fécondité des femmes et des hommes et donc des effectifs respectifs différents – ayant un effet sur le calcul des taux.
Au sujet de la méthodologie Les indicateurs de la Conjoncture démographique s’appuient sur les taux de fécondité par âge des femmes et des hommes publiés annuellement par l’Insee. Par tradition, la fécondité est le plus souvent étudiée dans la population féminine, mais il est également possible de la calculer pour les hommes. Il y a néanmoins une difficulté à mesurer les différences de niveaux de fécondité des hommes car certaines naissances ne sont associées à aucun père dans la déclaration à l’état civil. Cette situation rare en France, est de l’ordre de 5 %. Pour ne pas sous-estimer la fécondité des hommes, la méthode consiste alors à répartir les « enfants sans père déclaré » selon la distribution par âge des pères observée parmi les naissances ayant un père déclaré. Ceci fait, des différences entre les sexes subsistent toutefois. Trois facteurs peuvent expliquer ces écarts : un déséquilibre du rapport entre le nombre d’hommes et le nombre de femmes aux âges de la procréation, une différence d’âge au moment de l’union, mais aussi des variations différentes des calendriers de la fécondité et de la nuptialité entre les deux sexes. |
Des profils de fécondité différents
Les profils de fécondité par âge des hommes et des femmes sont différents, même entre 18 et 50 ans. L’écart d’âge à la naissance de leurs enfants entre les hommes et les femmes reste stable entre 2000 et 2021, proche de trois ans. Il est principalement lié à la différence d’âge au moment de la mise en couple. Il varie en revanche en fonction de l’âge de la mère à la naissance : proche de 5 ans lorsque la mère a moins de 20 ans, il diminue et s’approche de 0 à mesure que l’âge de la mère à la naissance de l’enfant augmente (figure 2). Cette différence d’âge des parents à la naissance de l’enfant diminue légèrement depuis 2000, et cela à tous les âges. Pour les hommes comme pour les femmes, l’évolution des profils de fécondité par âge au cours des vingt dernières années est marquée par le vieillissement du calendrier de la fécondité et une baisse de la natalité (figure 1B).
Des effets de long terme inconnus
Il est difficile de prédire ce que seront les effets de long terme du vieillissement du calendrier des naissances : retarder le moment d’avoir des enfants n’induit pas nécessairement une réduction du nombre d’enfants en fin de vie féconde (ce que l’on appelle la descendance finale), en particulier chez les hommes, parmi lesquelles les contraintes biologiques sont moindres. Pour la génération 1961, on peut comparer les descendances finales des hommes et des femmes. Elles sont respectivement de 1,96 enfant par homme et 2,09 enfants par femme (figure 3). En revanche pour les hommes nés en 1970, la descendance est encore incomplète : certains auront des enfants au-delà de 50 ans. À 50 ans, l’écart de la descendance atteinte des hommes et des femmes se réduit après la génération 1960. L’avenir dira si les hommes nés au début des années 1970 auront à terme une descendance égale, voire supérieure à celle des femmes des mêmes générations.
Source : Didier Breton, Nicolas Belliot, Magali Barbieri et al., 2023, L’évolution démographique récente de la France : Les comportements des femmes et des hommes sont-ils si différents ?, Population (édition française) 78: 1-68.
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Mise en ligne : janvier 2024