Comment s’organise le sommeil au sein des couples ?
Entre 1h et 6h du matin, neuf individus sur dix dorment, comme l’indique l’enquête Emploi du temps réalisée par l’Insee en 2009-2010. Et de manière générale, les couples tendent majoritairement à synchroniser leur sommeil : 4 couples sur 5 se couchent et se lèvent aux mêmes heures. Les couples de retraités, d’inactifs de moins de 60 ans, de même que les couples d’actifs les plus favorisés présentent un sommeil plus synchronisé, quand le sommeil des couples occupant une position moins favorisée est plus désynchronisé. Ainsi, 18% des couples de cadres homogames et 25% des couples d’employés homogames connaissent un sommeil désynchronisé, d’une durée moyenne respective de 1h45 et de 2h45. Le sommeil désynchronisé concerne 27% des couples d’ouvriers homogames et s’élève à 3h00 en moyenne.
L’impact de la télévision
S’appuyant sur les trois enquêtes Emploi du temps qui ont été conduites entre 1985 et 2010, Capucine Rauch, doctorante à l’Ined, met en évidence une diminution du temps de sommeil en commun au cours de ces 25 années. Notons que le vieillissement contribue à cette désynchronisation, tandis que l’essor de l’emploi féminin la freine.
En effet, en 2009, les conjoints, indépendamment de la classe sociale à laquelle ils appartiennent, dorment en moyenne 13 minutes de moins ensemble qu’en 1998 ou 1985. La raison ? Le temps passé devant la télévision pendant que son·sa conjoint·e dort (soit 30 minutes en 2009, contre 15 minutes en 1985). Cependant, si la place qu’occupe la télévision explique la baisse de la synchronisation du sommeil, elle n’en est pas la principale cause.
L’activité professionnelle au cœur de la désynchronisation du sommeil des conjoints
En tête des activités responsables du temps désynchronisé au sein des couples, on trouve, comptant pour 31 minutes, le travail rémunéré et les trajets associés, alors que la télévision ne représente que 23 minutes en moyenne, toutes années confondues. Le sommeil le plus synchronisé (d’une synchronie moyenne de 80%) est enregistré les jours où les couples ne travaillent pas. La désynchronisation observée est toutefois variable selon les classes sociales. D’environ quinze minutes en moyenne pour les couples de cadres homogames, elle s’élève à une heure chez les employés ou ouvriers homogames, du fait d’une possibilité moindre, pour ces derniers, de choisir leurs horaires, et, donc, d’horaires plus souvent décalés par rapport à leur conjoint·e.
La désynchronisation du sommeil, reflet des inégalités de genre
Le type d’activités effectuées par la personne éveillée pendant que son.sa partenaire dort matérialise par ailleurs une organisation genrée des tâches : les femmes consacrent davantage de temps aux tâches ménagères (en moyenne 20 minutes contre 5 minutes pour les hommes), les hommes davantage de temps à leur activité professionnelle (en moyenne 22 minutes contre 9 minutes pour les femmes).
Dans le même sens, la présence de jeunes enfants au sein du foyer influe sur la manière dont les femmes utilisent le temps pendant lequel leur conjoint dort, mais n’a pas d’impact significatif sur la manière dont les hommes utilisent le temps pendant lequel leur conjointe dort.
Source : Capucine Rauch, 2021, Inégalités sociales et désynchronisation du sommeil au sein des couples, Economie et statistique, Insee.
Contact : Capucine Rauch
Mise en ligne : août 2021