Les femmes qui accouchent sous le secret en France (2007-2009)
La France est le seul pays occidental, hormis le Luxembourg, l’Italie et la République tchèque, où la loi autorise les femmes à demander le secret de leur accouchement et de leur identité sur l’acte de naissance de l’enfant. Elle n’est jamais contrainte de donner son nom, d’où l’expression « sous X » apparue lorsque un « X » remplaçait le nom de la mère dans le dossier de l’enfant.
Depuis 2005, le nombre d’accouchements secrets augmente, de 588 il est passé à 700 environ en 2010.
Les caracteristiques sociodémographiques des mères
Une étude, réalisée dans 83 départements entre juillet 2007 et juin 2009 a permis de connaître les caractéristiques sociodémographiques de 739 femmes qui avaient demandé le secret.
Elles se distinguent de l’ensemble des accouchées en 2008 par :
- L’âge : Elles sont plus jeunes de quatre ans en moyenne (26 ans contre 30 ans). 11 % sont mineures contre 0,5 % et 18 % ont entre 18 et 20 ans contre 3 %. En raison de leur jeune âge, elles sont un peu plus souvent primipares (49 % contre 42 %), résident plus souvent chez leurs parents (31 %) et sont plus souvent en cours d’études (27 %).
- Leur situation familiale : Huit sur dix ne vivent pas en couple. Le corollaire est une part importante de femmes en situation de monoparentalité (28 %).
- L’absence d’autonomie financière : Trois sur quatre n’ont pas leur indépendance économique. Elles sont élèves ou étudiantes (27 %), inactives (15 %), au chômage (10 %) ou ont un emploi précaire ou un petit temps partiel (9 %).
Cependant, l’accouchement sous X est aussi pratiqué par des femmes plus âgées : 16 % ont au moins 35 ans (contre 18 %) ; par des femmes en couple : 15 % vivent avec le père biologique et 6 % avec un autre homme ; par des femmes qui occupent un emploi relativement stable : 24 %. Par ailleurs, contrairement à une représentation largement répandue, elles ne sont pas plus souvent étrangères (9 %) ou françaises d’origine étrangère (15 %) que les autres femmes. Les plus jeunes sont toutefois plus souvent d’origine maghrébine : 14 % contre 10 % entre 18 et 25 ans.
Les raisons de leur décision
Les mères de naissance peuvent indiquer dans le dossier destiné à l’enfant les raisons qui ont motivé leur décision. L’absence du père biologique ou son comportement sont les plus fréquentes (43 %). Puis, par ordre décroissant, les difficultés financières, un âge trop jeune, la crainte du rejet familial, des traumatismes récents ou anciens. A toutes ces difficultés, s’ajoute une découverte trop tardive de la grossesse : plus de huit femmes sur dix n’ont pris conscience de leur état qu’après la fin du délai légal pour une IVG en France.
Volonté de se faire connaître
Les parents de naissance disposent d’un délai légal de deux mois pour revenir sur leur décision. Avant l’expiration de ce délai, 14 % des mères ont repris l’enfant (une fois sur quatre avec le père). Parmi celles qui ne l’ont pas repris, 23 % ont laissé leur identité directement accessible à l’enfant s’il souhaite la connaitre un jour ; 31 % ont laissé un pli fermé dans lequel, en principe, elles ont noté leur identité ; 46 % n’ont laissé aucun élément permettant de les identifier.
Source : Catherine Villeneuve-Gokalp, 2011, Les femmes qui accouchent sous le secret en France, 2007-2009, Ined, Population, Vol. 66/1, 135 - 169 [publication]
Contact : Catherine Villeneuve-Gokalp
Mise en ligne : janvier 2012