Disparités de santé et de mortalité

Pour situer les recherches de cet axe dans un cadre de réflexion plus large, un retour à la théorie de la transition sanitaire s’impose.
Cette théorie [1 ; 2] , qui formalise la dynamique des facteurs qui ont conduit à l’élévation durable de l’espérance de vie, met l’accent à la fois sur le caractère discontinu des progrès et innovations et sur le caractère progressif de leur diffusion. En effet, ce sont les populations les mieux à même d’exploiter les avancées – qu’elles soient médicales, technologiques, politiques, sociales ou comportementales-, qui sont les premières à en tirer profit, avant une diffusion plus large, suivie de l’apparition de nouvelles avancées ouvrant la voie à un nouveau cycle. Cette dynamique conduit à l’apparition de disparités entre pays et, de la même façon, entre groupes d’un même pays. Ainsi, à différentes échelles, c’est « le progrès lui-même qui, à la fois, donne à certains les moyens de nouvelles avancées et creuse les inégalités ».
Cette vision a été théorisée également à l’échelle individuelle dans un article intitulé « les conditions sociales comme causes fondamentales des maladies » [3], qui a fait référence. Les deux échelles d’observations (échelle nationale, échelle individuelle) intéressent de longue date les chercheurs de l’unité « Mortalité, santé, épidémiologie », et le présent axe de recherches se situe au niveau le plus fin, celui des disparités au sein des populations. Deux approches différentes sont adoptées. Une première approche en population générale mobilise de grands corpus de données à l’échelle nationale. Il s’agit de croiser les axes de stratification habituels des études de mortalité différentielle pour mieux comprendre les mécanismes en jeu dans les écarts observés entre sous- populations, y compris les inégalités liées à la crise sanitaire de la Covid-19. La deuxième approche repose sur le suivi de populations spécifiques, qu’il s’agisse des « nouvelles longévités » [4] de personnes qui autrefois mouraient jeunes, et atteignent de nos jours l’âge adulte, voire le début de la vieillesse (patients atteints de mucoviscidose, enfants infectés par le VIH), de scolarisation des enfants handicapés, de mortalité des jumeaux, ou encore de patients atteints de cancer soignés en hospitalisation à domicile.