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Editorial
Damien Bricard, Géraldine Duthé, Delphine Remillon

Que pensent les Français des dynamiques démographiques en France et dans le monde ? Les enseignements d’une enquête d’opinion dans la lignée des enquêtes de conjoncture de l’Ined
Virginie De Luca Barrusse, Cécile Lefèvre, Jacques Véron

Dirigeants et professionnels de haut niveau : une définition statistique de l’«élite socioprofessionnelle»
Thomas Amossé, Milan Bouchet-Valat

Les violences sexuelles dans les vies des gays et des bisexuels. Configurations, dissémination et orientations intimes
Claire Scodellaro, Mathieu Trachman, Liam Balhan

Vivre en marge du mariage. Le célibat tardif des femmes à Lomé (Togo)
Charlotte Vampo, Agnès Adjamagbo, Valérie Delaunay, Yéniban Madiega

Evolutions régionales des naissances pendant l’épidémie de Covid-19 en Allemagne, en Espagne, en France et en Italie. Le rôle des facteurs économiques et de la surmortalité
Francesca Luppi, Bruno Arpino, Alessandro Rosina

Bibliographie critique : Dossier « Rapports à l’espace : mobilités, représentations, socialisations »

 

Que pensent les Français des dynamiques démographiques en France et dans le monde ? Les enseignements d’une enquête d’opinion dans la lignée des enquêtes de conjoncture de l’Ined
Virginie De Luca Barrusse, Cécile Lefèvre, Jacques Véron

En 2018 a été menée l’enquête Pop Aware, dans le cadre du panel Elipss, représentatif de la population française. En étudiant tout autant les connaissances que les opinions relatives aux dynamiques démographiques, en France et dans le monde, cette enquête poursuit un double objectif : d’une part, elle reprend des questions posées des décennies plus tôt sur la situation française, permettant ainsi des comparaisons dans le temps ; d’autre part, elle introduit de nouvelles réflexions, en étendant notamment le champ de son questionnement aux enjeux mondiaux. Les enquêtés considèrent les questions démographiques comme importantes, et ce, de façon relativement indépendante des caractéristiques sociodémographiques et des opinions politiques. Ils expriment aussi une préférence pour la stabilité de la population plutôt que pour sa décroissance, malgré une augmentation des opinions liant dynamique démographique et problèmes environnementaux, notamment chez les jeunes. Ce degré élevé de sensibilité aux phénomènes démographiques est entretenu à la fois par les médias et par l’école. Il n’est pas récent. Des enquêtes de conjoncture et d’opinion publique réalisées sur une période de 60 ans le mettaient déjà en évidence. La conduite d’enquêtes similaires, dans d’autres pays comme en France, serait pertinente pour saisir d’éventuelles variations, dans l’espace et dans
la durée, des manifestations de cet intérêt pour la démographie.

Dirigeants et professionnels de haut niveau : une définition statistique de l’«élite socioprofessionnelle»
Thomas Amossé, Milan Bouchet-Valat

Cet article présente le cadre théorique, la méthode de construction et les premières analyses d’une nouvelle catégorie associée à la nomenclature des professions et catégories socioprofessionnelles (PCS 2020), les « dirigeants et professionnels de haut niveau », qui vise à identifier les positions professionnelles les plus élevées au sein de la société française. Cette catégorie délimite, parmi les chef·fes d’entreprise et les cadres et professions intellectuelles supérieures, la fraction supérieure des positions (salariées ou non) caractérisées par une responsabilité importante dans les organisations de travail et/ou une expertise reconnue comme étant de haut niveau. Objectivées par un libellé d’emploi et des caractéristiques professionnelles, ces positions définissent une « élite socioprofessionnelle » (3 % de la population en emploi) qui permet de réaliser la jonction entre la sociologie de la stratification et la sociologie des élites. Mise à disposition dans les enquêtes de la statistique publique, cette catégorie contribue à renouveler l’analyse des inégalités socioprofessionnelles de façon complémentaire aux approches s’appuyant sur les plus hauts niveaux de diplôme ou de revenu. En guise de première illustration de ses possibles apports empiriques, cet article met en évidence une très forte reproduction intergénérationnelle en haut de l’espace social.

Les violences sexuelles dans les vies des gays et des bisexuels. Configurations, dissémination et orientations intimes
Claire Scodellaro, Mathieu Trachman, Liam Balhan

Les violences sexuelles subies par les minorités sexuelles masculines ont fait l’objet de travaux qui se sont largement focalisés sur les abus sexuels subis dans l’enfance, occultant les violences à l’âge adulte. Les études prennent peu en compte les spécificités et la diversité des modes de vie de ces populations et les différentes manières de vivre les violences subies. À partir d’un échantillon d’hommes s’identifiant comme homosexuels et bisexuels issu de l’enquête de l’Ined Virage-LGBT sur les violences de genre menée en France en 2015-2016, cet article montre qu’il existe une diversité de situations au sein de cette population. En prenant en compte l’ensemble des violences sexuelles ayant eu lieu dans l’enfance ou à l’âge adulte, ainsi que plusieurs dimensions de la sexualité – identification, pratiques, sociabilité –, cinq configurations sexuelles se dessinent et se différencient par la place qu’y tiennent la sexualité, l’exposition aux violences et le rapport aux sociabilités homosexuelles. Cette approche permet d’identifier différents modes de vie au sein des minorités sexuelles masculines, dont certains sont sans doute propres à certaines générations, et de cerner des individus ayant subi des violences sexuelles tout au long de leur vie, y compris exercées par d’autres homosexuels, et qui semblent se disséminer dans leur existence. L’appartenance à une minorité sexuelle et les évolutions de son acceptation ne sont pas les seuls éléments permettant de saisir les logiques des violences sexuelles subies par cette population : l’organisation genrée de l’homosexualité masculine, les manières dont les vies des homo-bisexuels s’inscrivent dans des rapports de classe et d’âge incitent à proposer une approche intersectionnelle de ces violences.

Vivre en marge du mariage. Le célibat tardif des femmes à Lomé (Togo)
Charlotte Vampo, Agnès Adjamagbo, Valérie Delaunay, Yéniban Madiega

Comme dans d’autres capitales africaines, les données des enquêtes démographiques indiquent une augmentation du célibat tardif féminin à Lomé, au Togo. Cet article analyse, à l’aide de données qualitatives collectées entre 2011 et 2019 à Lomé, les situations sociales de femmes qui approchent, ont ou dépassent la trentaine et qui n’ont jamais été mariées. Il montre qu’une catégorie de femmes, urbaines, souvent diplômées du supérieur et/ou indépendantes économiquement, se marient de plus en plus tardivement, car elles aspirent à d’autres formes de réalisation sociale avant et en plus du mariage, dans un contexte où la compatibilité du mariage et du travail reste difficile à plusieurs niveaux. Celles qui ne veulent pas se marier et l’assument sont rares : la plupart des femmes aspirent au mariage ou se résolvent à le faire pour se garantir une forme de tranquillité sociale. En plus de la hausse de la scolarisation, c’est bien la volonté d’autonomie – entre autres financière – dans un contexte social où les conditions de vie et d’emploi des hommes se détériorent, qui complexifie l’entrée en union de femmes dont l’indépendance déstabilise les normes de genre.

Evolutions régionales des naissances pendant l’épidémie de Covid-19 en Allemagne, en Espagne, en France et en Italie. Le rôle des facteurs économiques et de la surmortalité
Francesca Luppi, Bruno Arpino, Alessandro Rosina

Les données recueillies au début de la pandémie de Covid-19 révèlent des effets contrastés sur le nombre de naissances en Europe. Cette note de recherche compare les tendances régionales du taux global de fécondité (TGF) avant et après le début de la pandémie dans les quatre pays européens les plus peuplés : l’Allemagne, l’Espagne, la France et l’Italie. Elle examine la relation entre l’évolution du TGF pendant la pandémie et différents facteurs : les décès liés au Covid-19, les changements sur le marché du travail, et la population exposée au risque de pauvreté. Les données régionales sur les naissances mensuelles entre janvier 2018 et décembre 2021 proviennent des instituts nationaux de statistiques, tandis que les données supplémentaires sont fournies par Eurostat. Notre analyse comporte deux ensembles de régressions. Premièrement, des modèles de régression linéaire à effets fixes sont mis en oeuvre au niveau régional pour chaque pays, afin d’estimer les effets de trois périodes pandémiques sur le TGF mensuel. Deuxièmement, les coefficients de régression obtenus sont intégrés, en tant que variables dépendantes, dans des régressions linéaires pondérées qui incluent des variables régionales relatives aux évolutions du marché du travail, au risque de pauvreté, et à la surmortalité. Nos résultats révèlent des disparités régionales (au sein des pays) quant à l’évolution des naissances pendant la pandémie. Ils mettent en évidence une relation significative entre la baisse de la natalité et la hausse du chômage des jeunes.