L’Europe et le spectre des migrations subsahariennes
Population et Sociétés
n° 558, septembre 2018
L’Afrique subsaharienne devrait représenter 22 % de la population mondiale vers 2050 au lieu de 14 % aujourd’hui. Le nombre de migrants originaires de cette région devrait donc augmenter. Mais de combien et vers quelles destinations ? François Héran replace les migrations africaines dans le tableau mondial des diasporas. Il montre que le scénario pour 2050 d’une Europe peuplée à 25 % d’immigrés subsahariens ne tient pas la route. L’ordre de grandeur le plus réaliste est cinq fois moindre.
L’Europe doit-elle se préparer à une « ruée » prochaine de migrants subsahariens ? Cette prophétie repose sur un modèle de vases communicants qui méconnaît trois données de base :
1/ comparée aux autres régions, l’Afrique subsaharienne émigre peu, en raison même de sa pauvreté ;
2/ lorsqu’elle émigre, c’est à 70 % dans un autre pays subsaharien ;
3/ si l’on intègre les projections démographiques de l’ONU, les migrants subsahariens occuperont une place grandissante dans les sociétés du Nord mais resteront très minoritaires : environ 4 % de la population vers 2050 – très loin des 25 % annoncés par certains.
Directeur de recherche et directeur de l’Ined de 1999 à 2009). François Héran est actuellement professeur au Collège de France sur la chaire « Migrations et sociétés » et dirige l’Institut Convergences Migrations.