Le Point de vue du nombre (1936)
Collection : Classiques de l’Économieet de la Population
2005, 480 pagesIntroduction. – Rééditer Le Point de vue du nombre.
Section A. – Combats.
Chapitre I. – Coup d’œil sur l’Encyclopédie française.
Chapitre II. – Les Races dans L’Espèce humaine.
Chapitre III. – « Il fallait cette association… ».
Section B. – Chantiers.
Chapitre I. – Histoire de la preuve par le nombre des naissances.
Chapitre II. – Morphologie et mémoire.
Chapitre III. – La démographie en révolution.
Chapitre IV. – La réception de la démographie de Halbwachs sous le IIIe Reich.
Chapitre V. – Le critère du fait social. Retour sur le taux de masculinité à la naissance.
Conclusion. – Questions récurrentes.
Le Point de vue du nombre (1936)
Avant-propos de Lucien Febvre.
Introduction. – L’Espèce humaine et les faits de population.
Section A. – La population en général.
Chapitre I. – Population de la Terre et des continents.
Chapitre II. – Population par pays.
Chapitre III. – La population des groupes ethniques.
Section B. – Le sexe.
Chapitre I. – Proportion des sexes dans la population globale.
Chapitre II. – Le rapport des sexes à la naissance.
Section C. – Le renouvellement des générations.
Chapitre I. – L’âge et les naissances.
Chapitre II. – Les naissances illégitimes.
Chapitre III. – Les mariages.
Chapitre IV. – Les sociétés devant la mort.
Chapitre V. – La vitalité ou le pouvoir d’accroissement d’un peuple.
Section D. – Degrés de peuplement et migrations.
Chapitre I. – Densité de la population.
Chapitre II. – Déplacements de groupes.
Conclusion. – La politique de la population.
Textes additionnels de Maurice Halbwachs
La statistique et les sciences sociales en France (1931).
Recherches statistiques sur la détermination du sexe à la naissance (1933).
Notes sur l’application de certains procédés analytiques à l’étude de la population (1937).
Notices biographiques. – Bibliographies. – Index des noms de personnes. – Index des matières. – Index des noms de pays et de régions. – Listes des illustrations, graphiques et tableaux. – Table méthodique des matières.
Le Point de vue du nombre était la troisième partie du tome VII de l’Encyclopédie française, vaste entreprise de science et d’instruction publique voulue dès 1932 par le ministre Anatole de Monzie et mise en œuvre par l’infatigable animateur du renouvellement historiographique français autour des Annales, Lucien Febvre. Ce volume, préparé après les émeutes d’extrême droite de février 1934, est paru au lendemain de la victoire du Front populaire, au printemps 1936. Il a été conçu comme un geste de vigilance et de rigueur scientifiques.
Pour donner une démographie comparée de l’état du monde en 1935, Halbwachs s’est adjoint les services d’un jeune économiste de la Statistique générale de la France, Alfred Sauvy. L’ouvrage a gouverné la biographie intellectuelle du futur fondateur de l’ined, autant qu’il a inauguré le genre du traité de démographie.
En 2005, les commentaires du texte de 1936, et ceux de trois articles connexes, sont issus du concours de compétences démographiques, sociologiques, mathématiques, philosophiques et historiographiques.
Pour procurer à la démographie et aux sciences sociales actuelles un moyen rigoureux d’articuler leurs interrogations avec celles agitées dans le passé, pour restituer un moment capital de l’histoire des sciences sociales dans la France du XXe siècle, l’introduction générale livre tout d’abord un aperçu de l’entreprise encyclopédique des années trente. La manière dont les questions de races sont traitées tout au long du tome VII, les contributions des différents auteurs, l’un sociologue et les autres statisticiens, sont ensuite analysées.
Dans un second temps, Le Point de vue du nombre est situé dans la série longue des conceptions des preuves numériques connues depuis le XVIIIe siècle. Puis l’ouvrage est rapporté aux principaux itinéraires de l’œuvre scientifique de Maurice Halbwachs. Il est aussi considéré comme un indice de l’état des sciences des populations pendant l’entre-deux-guerres. Le destin des recherches démographiques de Maurice Halbwachs sous le IIIe Reich fait de plus l’objet d’une enquête approfondie. Enfin, les résultats très méconnus du sociologue quant à la détermination du sex-ratio à la naissance sont soumis à un examen critique et éprouvés par de nouveaux calculs.
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"Rien ne prouve qu’aujourd’hui, comme peut-être autrefois, les considérations de force numérique passent au premier plan. La lutte entre les groupes, pour l’espace et pour les subsistances, a changé de caractère depuis que la puissance des nations résulte non seulement du nombre de leurs habitants, mais encore de leur appareil économique, de leur organisation politique, de leurs capacités d’assimilation, et aussi d’adaptation à un milieu international bien plus complexe.
Mais considérons un autre phénomène mondial, le rythme ralenti de la hausse, et même la baisse de la natalité, qui se peut observer depuis cinquante ans, dans les pays les plus évolués et plus peuplés. N’est-ce pas le signe qu’une population, lorsqu’elle approche d’un certain équilibre par rapport à un type de civilisation (ici, la civilisation industrielle), tend à se stabiliser ?
Rien, mieux que l’observation de ces grandes analogies entre les mouvements de population, dans le plus grand nombre des pays, n’inclinerait à penser qu’il y a bien une évolution démographique mondiale, et qu’en particulier le cours de la natalité dans chacun de ces pays est conditionné par un état de la civilisation générale."
Maurice Halbwachs, Le Point de vue du nombre, mars 1936.
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"Purifier la Race. Accélérer ou ralentir la cadence des naissances, le rythme de l’Espèce. Mais où prennent-ils la Race, où prennent-ils l’Espèce, ces meneurs de jeu à l’ignorance encyclopédique ? – ces guides si mal guidés qui, maîtres du pouvoir sur un infime canton de la planète, prétendent modifier à leur gré la composition physique des quelques millions d’hommes qu’ils régissent, accroître leur nombre, ou le diminuer en pesant de tout leur poids, sur les assujettis ? Régissent-ils, du même coup, les masses voisines ? Pèsent-ils sur les millions d’hommes de l’Asie, de l’Afrique, des Amériques ? Et sinon, que valent leurs prétendus remaniements de tel ou tel morceau de notre Europe ? Au vrai, le seul résultat de leurs interventions, c’est de créer des mythes et des psychoses. De semer à pleine main les germes de conflits.
Solidarité des sciences et des méthodes, toutes appelées à collaborer pour la meilleure connaissance des Sociétés humaines. Solidarité des groupes, qui ont beau se distinguer et se diviser : ils n’en constituent pas moins, tous réunis, l’Espèce. S’il fallait de ce livre tirer une leçon, voilà celle que, pour ma part, je voudrais retenir."
Lucien Febvre, avant-propos, avril 1936.