Migration et nuptialité. Naissance d’une population européenne en Algérie au XIXe siècle
Présenté par Guy Brunet (U. Lyon 2) et Kamel Kateb (Ined) ; discutant : Cyril Grange (CNRS, Centre Roland Mousnier)
En quelques décennies, de 1830 à 1900, une population d’origine européenne s’est installée en Algérie, et son effectif est passé de quelques milliers d’individus à plus de 650 000. Cette nouvelle population résulte de différents courants d’immigration, en provenance de nombreux pays du continent européen, mais aussi de la naissance sur place de nouvelles générations « créoles », issues des premiers colons.
Notre recherche vise à comprendre le fonctionnement interne de cette société coloniale qui vivait à côté de populations appelées « indigènes » et qualifiées selon leur religion, « musulmane » et « israélite ». Comment ces groupes humains se sont-ils organisés ? A-t-on assisté, selon une formule très utilisée au cours du XIXe siècle, à la « fusion des races » ? Et peut-on parler, à la fin du XIXe siècle, d’une population européenne homogène, ou le maintien des clivages sociaux et nationaux est-il encore vif ?
Pour répondre à ces questions, nous avons constitué une base de données regroupant environ 13 000 mariages, enregistrés entre 1830 et 1895, dans treize des principales villes du territoire algérien, dont Alger, Oran et Constantine. Les analyses permettent de souligner la diversité des itinéraires individuels et collectifs, de même que l’hétérogénéité des situations locales, entre villes de l’ouest, qui ont connu un important apport espagnol, et villes de l’est, plus fréquentées par des migrants venus de Malte et d’Italie, entre villes côtières et villes de l’intérieur.
Guy Brunet
Guy Brunet, historien et démographe, est professeur à l’Université Lyon 2 et vice-président de la Société de Démographie Historique. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages, dont Essai de démographie historique et de génétique des populations publié par l’INED en 2006. Il a récemment dirigé le livre collectif Mariage et métissage dans les sociétés coloniales, Amériques, Afrique et Iles de l’Océan Indien, XVIe-XXe siècles (Berne, Peter Lang, 2015).
Kamel Kateb
Kamel KATEB chercheur démographe à l’INED, participe aux travaux des unités de recherche « Identités et territoires des populations » et « Migrations Internationales et Minorités ». Ses travaux portent sur l’histoire statistique de l’Algérie, sur l’histoire des populations des pays du Maghreb, sur les systèmes éducatifs de ces pays et sur les migrations entre le Maghreb et l’Europe.
Il a notamment publié les ouvrages :
- Européens, « indigènes » et juifs en Algérie pendant la période coloniale
- Le système éducatif dans l’Algérie coloniale (1833-1962) bilan statistique et historiographique,
- Fin du mariage traditionnel en Algérie ? (1876-1998), Une exigence d’égalité des sexes
- Ecole, population et société en Algérie
- L’émergence des femmes au Maghreb. Une révolution inachevée