Inégalités de santé à Ouagadougou
Présenté par : Clémentine Rossier (Université de Genève, Ined et Ceped) et Géraldine Duthé (Ined) ; Discutant : Joseph Larmarange (IRD, Ceped)
Quelques études empiriques confirment la présence d’un double fardeau de maladies (maladies transmissibles et non transmissibles) en milieu urbain africain aujourd’hui. En revanche, aucune étude n’avait approché la question de la répartition des fardeaux sanitaires dans différentes couches sociales d’une ville africaine. Nous mobilisons ici les données de l’Observatoire de Population de Ouagadougou (OPO) collectées entre 2008 et 2013 dans cinq quartiers formels et informels de la capitale du Burkina Faso pour répondre à cette question. Les résultats indiquent qu’on ne peut pas parler de polarisation de la transition sanitaire à Ouagadougou, même si les inégalités de santé y restent très marquées : les riches comme les pauvres y souffrent d’un double fardeau sanitaire. Pour les plus pauvres, l’accès quasi universel à certains services de santé maternelle et infantile n’a pas tout l’effet escompté, notamment à cause d’un recours aux soins très peu équitable (une grande partie des frais de santé restent à la charge des patients), d’une qualité des soins déficitaire, et d’un contexte environnemental peu propice. Si la classe moyenne meurt moins de maladies transmissibles, le VIH/sida, des infections respiratoires et du paludisme continuent d’y frapper, pour les mêmes raisons. Par ailleurs on observe certains signes de contre-transition en ce qui concerne les maladies non transmissibles : les facteurs de risques (alcool, manque d’exercice physique, tabac, obésité) ainsi que la dépression sont plus répandus chez les plus favorisés, et les différences socio-économiques restent faibles en ce qui concerne les limitations et déficit chez les plus âgés.
Géraldine Duthé
Géraldine Duthé est chercheure à l’INED, co-responsable de l’UR15 « Démographie des populations du Sud » et coordinatrice scientifique du projet européen DEMOSTAF (Demography Statistics for Africa). Ses recherches portent sur la transition sanitaire dans les pays du Sud, notamment la mortalité en Afrique de l’Ouest en étudiant la mortalité générale, les causes de décès et les inégalités à différents âges de la vie dans les sites de suivi démographique.
Clémentine Rossier
Clémentine Rossier est professeure à l’Institut de démographie et de socioéconomie à l’Université de Genève. Ses recherches portent sur l’avortement, la contraception et la fécondité en Afrique subsaharienne, et les liens entre relations familiales et bien-être dans les pays riches. Impliquée dans l’implémentation de l’Observatoire de Population de Ouagadougou de 2008 à 2013, elle garde un intérêt pour les questions de mortalité et de santé dans les sites de surveillance démographiques.