Faire famille après la naissance du premier enfant - Place et rôle des grands-parents
Présenté par Alain Thalineau et Laurent Nowik (UMR CITERES – Université de Tours) ; discutante : Claudine Attias-Donfut (CNAV, Associée au Centre Edgar Morin, CNRS/EHESS)
Depuis plus de trente ans, la sociologie des rapports entre générations s’est intéressée aux relations d’échange au sein de la parenté. Malgré les apparences, la famille étendue reste l’espace des solidarités familiales tout au long du cycle de vie. Pour autant, la famille élargie se compose de familles nucléaires. A chaque génération, le départ du « nid parental » de chaque enfant se traduit, dans un délai plus ou moins long selon le genre et le milieu social, par la construction d’une conjugalité sous un autre toit et, avec la naissance du premier enfant, par la fabrique d’une nouvelle famille.
Dans cette communication, nous nous intéresserons à la façon dont les nouveaux parents définissent la place des grands-parents vis-à-vis du nourrisson. Il va de soi, a priori, que l’attente des nouveaux parents à l’égard des grands-parents dépend fortement d’un certain nombre de facteurs liés à leur situation : le fait par exemple de demeurer ou non dans une proximité géographique, d’être déjà ou non grands-parents, d’être en activité ou non (tout particulièrement pour les grand-mères). La disponibilité des grands-parents peut aussi être affectée par le fait d’avoir un rôle d’aidant(e) à l’égard de leurs propres parents (donc des arrière-grands-parents du nourrisson). D’autres conditions sont liées à la situation économique des parents et à la façon dont leurs attentes sont légitimées par les grands-parents. L’enquête Elfe (à 2 mois) ayant interrogé les parents sur leurs relations aux grands-parents par rapport aux nouveau-nés, il nous est possible de saisir la différence des attentes des mères « primipares » par rapport aux autres mères (ayant mis au monde des enfants de rang 2 ou plus), dans l’objectif de mieux connaître le processus de construction de la nouvelle famille vis-à-vis des familles d’origine.
En l’état actuel des données, il ne nous est pas possible de repérer les « familles-entourage » telles que les ont définies Catherine Bonvalet et Dominique Maison (1999). Cependant, en lien avec l’enquête Elfe, nous réalisons parallèlement une enquête qualitative longitudinale auprès de 35 mères ayant des contacts avec au moins l’un de leurs parents : des contacts réguliers (au moins une fois par semaine), des relations affinitaires (elles se disent « proches » du parent) ou d’entraide, passant par la garde occasionnelle ou régulière du nourrisson. Dans l’analyse des entretiens, nous avons pris en compte la distance géographique séparant les parents et les grands-parents affinitaires. Ces entretiens complètent et enrichissent les résultats de l’enquête Elfe, permettant de discuter le processus d’autonomisation des « nouvelles familles » à l’égard de leur propre famille d’origine (i.e. des « nouveaux parents » à l’égard des grands-parents).
Les relations entre les générations lors de la création de la nouvelle famille sont à replacer dans la dynamique sociale propre au nouveau couple parental. La position de chaque partenaire au sein du système productif, les modes de reconnaissance sociale que cette activité apporte, les articulations et les ajustements au sein du couple entre les activités professionnelles et familiales, sont autant de facteurs pouvant conduire à avoir des attentes différentes vis-à-vis des grands-parents.