Corpulence, obésité et inégalités sociales en Europe : le poids du genre
Discutant : Emmanuelle Cambois
La corpulence des individus est un caractère objectivable qui
permet d’apprécier la complexité des liens qui unissent le poids
des individus aux caractéristiques sociales qui les distinguent.
Socialement déterminée, la corpulence est ainsi un moyen pratique
de mettre en évidence les enjeux que le corps incarne et dissimule,
et ce en exploitant de façon critique les données d’enquêtes
françaises et européennes.
Cette étude fait apparaître l’importance du genre dans
l’appréhension des différences de corpulence. Les écarts entre
milieux sociaux sont plus forts pour les femmes. Le rapport des
femmes à leur corps et à la minceur apparaît plus contraint que
celui des hommes, la corpulence renvoyant plus chez elle à la
beauté et chez les hommes à la force. Pour ces derniers, le
sous-poids, dévalorisé, joue un rôle symétrique au surpoids chez
les femmes.
L’étude de la situation française dans un cadre européen fait
apparaître sa singularité. L’augmentation de la prévalence de
l’obésité va de pair avec un accroissement des inégalités sociales
qui touche plus particulièrement les femmes. Le lien entre obésité
et pauvreté vaut surtout d’ailleurs, en France, pour elles. Mais
quel que soit leur sexe, les personnes obèses souffrent des
conséquences de leur poids à la fois en termes de santé,
d’intégration professionnelle et de perception de soi. Si les
femmes apparaissent plus sensibles à la dimension esthétique et les
hommes à la dimension médicale, ces deux aspects s’entremêlent. Les
inégalités de santé vont de pair avec les inégalités d’apparence et
sont à la fois produites par et productrices des inégalités
économiques et sociales.