Nouer les relations et incorporer la position sociale à Dakar : quand les enfants nés aux Etats-Unis grandissent au Sénégal
Présenté par : Amélie Grysole (Ined) ; Discutant : Mathieu Ichou (Ined)
Une part des enfants nés aux États-Unis de parents subsahariens migre vers les capitales ouest-africaines, pour y grandir quelques années. Cet article se base sur un terrain de thèse, ethnographique et transnational, réalisé de 2013 à 2015, entre les États-Unis et le Sénégal. Il s’agit d’analyser la stratégie d’envoi à Dakar d’enfants, nés aux États-Unis de parents sénégalais issus de la petite classe moyenne dakaroise, comme à la fois celle d’une lutte contre le déclassement social subi en migration et d’un entretien du capital social familial à distance. Les parents et les enfants appartiennent à des maisonnées transnationales qui dépassent les limites de la famille conjugale et nucléaire. Les stratégies de mobilité sociale inclues dans le projet migratoire se négocient entre deux territoires nationaux, deux espaces de classement et deux positions sociales différentes. Aux États-Unis, les couples de parents rencontrés cherchent à se distinguer des autres Noirs et des autres immigrés. Ils perçoivent les quartiers ségrégués, populaires et immigrés où ils résident aux États-Unis, comme des environnements hostiles, mettant en péril l’avenir de leurs enfants. À Dakar, les enfants mettent en scène la réussite sociale de leurs parents, en même temps qu’ils incorporent une position sociale plus élevée qu’aux États-Unis. Ils tissent également les liens nécessaires pour la pérennité des maisonnées transnationales dans le futur.
Amélie Grysole
Amélie Grysole est doctorante en sociologie à l’INED et au Centre Maurice Halbwachs (EHESS). Sa thèse a bénéficié d’un contrat doctoral et d’un accueil au sein de l’UR « Migrations internationales et minorités » ; elle a occupé un poste d’ATER (2015-2017) à l’Université Paris-Ouest La Défense. Son travail de thèse, basé sur une enquête multi-sites (Sénégal, Etats-Unis, Italie), porte sur les stratégies de mobilité sociale de familles transnationales issues de la petite classe moyenne dakaroise. Ses intérêts de recherche incluent : les migrations, le genre et l’économie domestique ; la reproduction transnationale et la lutte contre le déclassement en migration ; les inégalités locales et globales ; la valeur des enfants selon le territoire ; les investissements scolaires.