Ménage, garde d’enfants, courses...
Comment les hommes et les femmes se répartissent les travaux domestiques depuis la mise en place de la réforme des 35h ?
Communiqué Publié le 23 Janvier 2020
En libérant du temps, la réforme des 35h a modifié l’organisation des activités domestiques des hommes et des femmes, en termes de durée, de type de tâches réalisées et de répartition entre week-end et semaine. S’appuyant sur la dernière enquête sur l’emploi du temps des français (Insee, 2010), Ariane Pailhé et Anne Solaz, chercheures à l’Ined, ont réalisé avec Arthur Souletie, l’une des rares études permettant d’évaluer les conséquences de cette réforme dans la sphère privée. Alors que le temps libéré par la réforme est identique, son utilisation diffère selon le sexe. Les femmes restent responsables des tâches ménagères courantes et répétitives tandis que les hommes effectuent des tâches plus flexibles dans le temps, et assouplissent ainsi leur emploi du temps.
Une asymétrie des tâches entre les hommes et les femmes renforcée par la réforme
A caractéristiques égales, les hommes qui sont aux 35h consacrent beaucoup plus de temps aux activités domestiques que leurs homologues aux 39h (environ 12 mn de plus en moyenne par jour). Les jours de semaine, ils passent plus de temps à des tâches telles que le bricolage et le jardinage, les démarches administratives et la garde d’enfants « récréative », libérant du temps sur leur week-end où ils y consacrent en revanche moins de temps. Travailler à 35 heures ne conduit pas les femmes à passer plus de temps aux tâches domestiques, mais à en consacrer davantage à leurs enfants, dans des tâches de soins principalement. Qu’elles travaillent à 35 ou 39 heures, les femmes font très rarement du bricolage (89 % n’en font pas) tandis que la plupart des hommes ne font jamais de repassage (86 %). En revanche, une majorité de femmes font la cuisine, la vaisselle et le ménage quotidiennement. Contrairement à ces tâches courantes et répétitives effectuées par les femmes, celles effectuées par les hommes sont plus discrétionnaires et leur permettent de mieux réorganiser leur emploi du temps entre semaine et week-end.
La répartition des tâches est plus « genrée » le week-end, lorsque leur exécution est plus visible socialement
Cette utilisation spécifique de la même quantité de temps supplémentaire par les hommes et les femmes montre que la répartition des tâches domestiques n’est pas seulement une question de disponibilité de temps, mais qu’elle est également profondément « genrée ». La réallocation de ce temps correspond aux stéréotypes et normes de genre traditionnels. Les comportements des hommes et des femmes pendant les week-ends illustrent particulièrement ce phénomène, avec un surinvestissement dans les tâches socialement stéréotypées (bricolage et jardinage pour les hommes, garde d’enfants pour les femmes) et un sous-investissement pour les hommes dans les travaux ménagers (notamment s’agissant du ménage et du linge).
Les femmes s’occupent davantage des enfants
Les femmes qui sont aux 35h consacrent ce temps supplémentaire en grande partie aux enfants plutôt qu’aux tâches ménagères. Ce résultat est conforme à la tendance croissante à consacrer plus de temps aux activités parentales au fil du temps, qui a été observée dans les pays développés. Cette réallocation du temps confirme l’évolution des normes parentales. Les enfants reçoivent plus d’attention et de temps de la part des parents parce que l’investissement parental est désormais considéré comme une nécessité, ce qui peut être bénéfique pour leur développement émotionnel.
Pour en savoir plus :
Ariane Pailhé, Anne Solaz et Arthur Souletie, 2019, "How Do Women and Men Use Extra Time? Housework and Childcare after the French 35-Hour Workweek Regulation", European Sociological Review 35: 807–824. http://hdl.handle.net/20.500.12204/AW0GfASRMYPEe5aYbjWG
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