Baisse massive de la fécondité mondiale en 20 ans, illustrée en cartes : La géographie de la fécondité a radicalement changé.
Communiqué Publié le 31 Janvier 2024
Auteurs : Christian Vandermotten (Université libre de Bruxelles et Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique), Christian Dessouroux (Université libre de Bruxelles).
Selon la prévision médiane des Nations unies, on devrait assister pendant encore six décennies à une hausse de la population mondiale. Toutefois, la baisse actuelle massive de la fécondité devrait y mettre un frein. L’indicateur conjoncturel de fécondité dans le monde (ICF) est de 2,3 en 2021. Il s’établissait à 5,1 en 1965, 3,7 en 1980, et encore 2,8 en 2000. La baisse s’est accélérée depuis 2015.
Deux-tiers de la population mondiale sous le seuil de renouvellement des générations
En vingt ans, la géographie de la fécondité a radicalement changé. À de rares exceptions près, l’ensemble du monde est concerné par cette baisse, y compris l’Afrique. Près des deux-tiers de la population mondiale vit en 2021 dans des zones où elle est sous le seuil de renouvellement des générations.
Les plus basses fécondités s’observent dans les zones côtières mégalopolitaines chinoises, la Mandchourie et la Corée du Sud, où l’ICF est passé sous le seuil d’un enfant par femme. Les populations de l’Europe et de l’Asie orientale, déjà à basse fécondité dans les années 2000, ont été rejointes dans cette catégorie par presque tout le continent américain, une grande partie de l’Inde, l’Indonésie et très récemment les Philippines.
Les données de fécondité mondiale fournies par le World Population Prospects et d’autres sources mobilisées dans cette étude, permettent d’analyser les spécificités régionales au sein des pays les plus peuplés. Par exemple, en Inde les contrastes infranationaux sont flagrants : au sud et à l’ouest de l’Inde, ainsi qu’au Bengale, l’ICF est presque partout inférieur à 2,1 alors qu’elle reste comprise entre 2,3 et 3 dans les régions pauvres de la vallée du Gange.
Les ICF supérieurs à 3 enfants par femme ne sont désormais observés que dans quelques zones du monde : une grande partie de l’Afrique, certaines zones du Moyen-Orient, l’Afghanistan et le Pakistan. Les ICF de plus de 5 ne sont plus présents qu’au Sahel, en Afrique centrale et dans la Corne de l’Afrique.
Les zones de forte fécondité ont quasi toutes entamé leur baisse
Les zones à forte fécondité (plus de 3,5 enfants par femme) sont devenues minoritaires (16,1 % de la population mondiale). Les moteurs du démarrage des processus de baisse sont l’élévation de l’âge du mariage et l’amélioration, encore insuffisante, de la scolarisation des filles et de leur accès au marché du travail, ainsi que le recours accru, plus ou moins rapide selon les pays, à la contraception. La baisse de la mortalité infantile réduit aussi le « besoin » de naissances.
Des profils divers pour les zones de faible et de moyenne fécondité
Les zones à faible fécondité (ICF compris entre 1,7 et 2,1) représentent 22,6 % de la population mondiale en 2021. Elles regroupent des zones de pays développés où la fécondité était contrôlée depuis longtemps, mais restait supérieure à 2,1 enfants (France, intérieur des États-Unis, Australie, cône sud de l’Amérique latine) et des zones situées dans les pays du Sud, où la fécondité a chuté nettement, à partir de niveaux encore supérieurs à 3 enfants par femme en 2000. Cela peut être des régions périphériques qui rattrapent leur modèle de fécondité national (en Iran, en Turquie, en Chine) ou à l’inverse des zones précurseures de la transition de la fécondité nationale en Inde, en Asie du Sud-Est et en Indonésie (Java). On y trouve aussi les pays du Golfe.
Les zones de fécondité moyenne (ICF compris entre 2,1 et 3,5) regroupent 20,5 % de la population mondiale. La transition, quoique bien avancée, est ralentie par des inerties religieuses ou culturelles, voire la difficulté pour les femmes éduquées à s’insérer sur le marché du travail (Maroc, Égypte, Afrique du Sud, Levant, région de Karachi).
Une cartographie originale mettant en valeur les zones de peuplement |
Authors: Christian Vandermotten (Université libre de Bruxelles et Académie royale des Sciences, des Lettres et des Beaux-Arts de Belgique), Christian Dessouroux (Université libre de Bruxelles).