Se souvenir et continuer à se transformer. La mémoire longue d’une contre-élite ouvrière
Séminaire organisé par l’UR6
"Bigarrée", la jeunesse qui renouvelle la classe ouvrière en entrant comme OS dans ce qui devient la plus grande usine de France au tournant des 1970 est aussi marquée par un relatif "décloisonnement de l'espace social" qui lui fait rencontrer d'anciens et anciennes étudiant·es. On entre en effet à Peugeot-Sochaux en arrivant de toute la France, du Maghreb, de Turquie ou de Yougoslavie attiré par des recruteurs, ou bien en étant une jeune femme du coin (bien souvent fille d'ouvrier) qui cherche à s'émanciper. Mais une forme de diffusion de la culture et l'effervescence politique de la période entrainent de nombreuses rencontres : techniciens du cinéma dans ce qui devient le groupe Medvedkine Sochaux, maoïstes, trotskystes, établis, militant·es artistes, enseignant·es, infirmières, médecins... Alors que les délégués syndicaux des générations précédentes étaient surtout des hommes professionnels, le statut d'OS devient une cause à défendre par soi-même : se forme alors une contre-élite ouvrière. A présent retraité·es et bien que décimé·es, ces "autres soixante-huitard·es" continuent de lutter, dans la rue mais aussi en prenant soin des un·e et des autres. La mémoire des injustices vécues dans l'enfance, qu'elles soient la conséquence de la seconde guerre mondiale, de la guerre d'Algérie ou plus prosaïquement de la domination du père ou du développement inégal de la première massification scolaire, continue de motiver la lutte, jusqu'au bout.
Biographie de l'intervenant
Nicolas Renahy est sociologue INRAE au CESAER, à Dijon. Il a notamment publié Les Gars du coin. Enquête sur une jeunesse rurale (La Découverte/Poche 2010), et codirigé Le Laboratoire des sciences sociales. Histoires d’enquêtes et revisites (Raisons d’agir, 2018), Mondes ruraux et classes sociales (EHESS, 2018), et Mépris de classe. L’exercer, le ressentir, y faire face (Croquant, 2021). Il persiste à s’intéresser au monde ouvrier, et se penche depuis peu sur la question des usages sociaux de la forêt.
Discutante
Pauline Clech est maîtresse de conférences en sociologie à l'Université de Rouen Normandie, chercheure au laboratoire Dysolab, membre du Réseau Thématique 5 de l’Association française de sociologie (« Classes sociales, inégalités ») et co-porteuse du projet ENRICHIMM (avec Mathieu Ichou), Ined.
Le séminaire est ouvert à toutes et tous.
Et sera également diffusé sur Teams : https://url-r.fr/qvHjq
ID de réunion : 377 492 599 443
Code secret : jk6VK33F