Religions et sexualité en France : évolution des pratiques, attachement à la famille hétérosexuelle
Presented by :Marion Maudet (Ined) ; Discussant : Eric Fassin (Université Paris VIII Vincennes Saint-Denis)
La présence publique et médiatique de certains représentants religieux et de fidèles vigoureusement investis autour de questions de genre et de sexualité invite à interroger, dans un contexte de désinstitutionalisation religieuse, d’individualisation des pratiques et de diversification des trajectoires biographiques, la manière dont s’articulent les rapports de genre et de religions dans les recompositions de la sexualité contemporaine.
Fondé sur une analyse pseudo-longitudinale, à partir des trois grandes enquêtes sur la sexualité en France (1970, 1992 et 2006), ce travail propose de montrer, selon la religiosité, les évolutions de la sexualité pour les femmes et pour les hommes, approchée à la fois par une série de pratiques sexuelles (âge au premier rapport sexuel, utilisation d’un moyen de contraception, recours à la pornographie, à la masturbation, etc.) et par des représentations du genre et de la sexualité (dont le rapport à la fidélité, à la procréation, à l’homosexualité et à l’homoparentalité).
En comparant les déclarations des fidèles à celles des personnes sans religion, plusieurs constats peuvent être faits, que nous préciserons lors de cette présentation et qui sont discutés dans un article, « Religions et sexualité : diversification des pratiques, attachement à la famille hétérosexuelle (France, 1970-2006) », paru dans la revue Population en 2017.
Premièrement, la recherche atteste de la diversification des pratiques sexuelles chez les femmes et les hommes catholiques même les plus engagé·e·s religieusement depuis 1970. Les pratiques sexuelles des musulman·e·s, décrites dans l’enquête CSF 2006, sont quant à elles moins diversifiée et fortement genrées.
Deuxièmement, les résultats de l’enquête CSF 2006 montrent que les positionnements des catholiques et des musulman·e·s à l’égard de l’homosexualité et de la norme hétérosexuelle se démarquent fortement de ceux des personnes sans religion d’appartenance. Ce résultat invite à considérer, quelques années avant les débats autour du mariage entre personnes de même sexe, l’attachement à la famille hétérosexuelle comme marqueur symbolique de différenciation des personnes engagées religieusement.
Le présent travail a ainsi pour but de mieux comprendre l’articulation complexe entre genre, sexualité et religion dans la France contemporaine.
Marion Maudet
Marion Maudet est doctorante en sociologie à l’Iris et à l’Ined sous la direction de Michel Bozon. Sa thèse porte sur les évolutions et recompositions de la sexualité contemporaine des individus en fonction du genre et de leur engagement religieux.