La fécondité des familles recomposées au Danemark et en France : résultats d'une étude préliminaire fondée sur deux échantillons de très grande taille

the Monday 01 March 2004 at l'INED.

Laurent TOULEMON (INED) et Lisbeth B. KNUDSEN (Aalborg University)

Au sein des familles recomposées, plusieurs définitions du nombre d’enfants sont possibles : enfants communs aux deux membres du couple, enfants de l’homme, de la femme. L’étude de la fécondité des familles recomposées permet de mettre à l’épreuve de nombreuses hypothèses quant à l’utilité des enfants pour les couples, les femmes et les hommes. Comme les enfants restent le plus souvent avec leur mère en cas de rupture du couple parental, la plupart des beaux-enfants vivent avec leur mère et un beau-père, et peu vivent avec leur père et une belle-mère. La portée des travaux fondés sur les enquêtes sur la fécondité et la famille (Fertility and family surveys, FFS) ou sur des enquêtes équivalentes est limitée par la taille des échantillons de ces enquêtes ; en particulier il est possible de décrire les variations de la fécondité des couples en tenant compte de l’existence de beaux-enfants, mais on ne peut distinguer selon que les beaux-enfants sont des enfants de l’homme ou de la femme, ou qu’ils vivent avec le couple ou ailleurs.
L’enquête Étude de l’historie familiale a été conduite en France dans le cadre du recensement de 1999, auprès d’un large échantillon d’homme et de femme (380 000 personnes âgées de 18 ans ou davantage). Les dates de naissance, d’arrivée et de départ des enfants et beaux-enfants (enfants d’un conjoint que la personne déclare avoir élevés) y sont précisées.


Pour le Danemark, le registre de population fournit une information sur la situation familiale de 1 300 000 femmes âgées de 15 à 49 ans. Chaque année, on connaît le nombre d’enfants et de beaux-enfants de la femme, selon qu’ils vivent ou non avec elle, ainsi que la présence d’un conjoint.
Ces deux fichiers offrent la possibilité d’étudier la fécondité des familles recomposées en tenant compte à la fois de l’histoire féconde des deux conjoints et de certaines caractéristiques sociodémographiques. La fécondité est mesurée à l’aide de modèles de durées, fondées sur la durée de vie en couple pour les couples n’ayant pas d’enfants en commun, et sur l’âge du plus jeune enfant pour les autres. On peut ainsi mesurer les variations de la fécondité selon la présence et le nombre des beaux-enfants de l’homme ou de la femme, vivant avec le couple ou non. Les informations sur la date de mise en couple et l’age des deux conjoints, ainsi que leurs niveaux d’études, peuvent également être prises en compte.


Des travaux précédents ont montré que la fécondité des couples variait surtout avec le nombre d’enfants de la femme, et peu avec le nombre d’enfants que l’homme a eu avant l’union. Les effectifs étaient trop faibles pour séparer cet effet de la différence entre enfants vivant avec le couple ou non.
Les mêmes hypothèses sont testées sur les données françaises et danoises. Le registre danois utilise une définition administrative des enfants et de leur résidence, tandis que les échantillons d’hommes et de femmes vivant en France s’appuient sur les réponses des personnes quant à leurs nombres d’enfants et de beaux-enfants et leur lieu de résidence. Quand l’homme seul a eu un enfant né avant le couple, la fécondité du couple est augmentée ; à l’inverse, quand les deux conjoints ont eu des enfants avant l’union ou quand le couple a déjà un enfant en commun, la fécondité du couple est plus faible. Des modèles plus détaillés conduisent à des résultats compliqués et instables. Les variations dues à la présence des beaux-enfants de l’homme ou de la femme, résidant ou non avec le couple, unique ou nombreux, ne s’additionnent pas ; pour la France, les résultats déduits des réponses des hommes sont incohérents avec ceux déduits des réponses des femmes ; pour le Danemark les résultats sont encore différents.