La construction sociale de la sexualité par le genre et le racisme

the Monday 23 May 2005 at l'INED, Salle Sauvy.

La construction sociale de la sexualité par le genre et le racisme: les descendantes des migrants du Maghreb et le principe de virginité
Discutante : Nathalie Bajos (Inserm-Ined Unité 569)

En France, la virginité féminine au jour du mariage est une norme sexuelle devenue marginale et rejetée. L’égalité des sexes étant désormais reconnue comme un objectif à atteindre, cette pratique et plus globalement les normes socio-sexuées qui relèvent manifestement de la domination de genre sont jugées contraires à une évolution positive de la société. Dès lors ces normes jugées rétrogrades exposent les groupes et les individus qui les appliquent à la stigmatisation. Telle est la situation vécue par les familles d’immigrés maghrébins qui se voient ainsi accusées de promouvoir une vision particulièrement sexiste des relations entre les sexes. Si la condamnation du traitement inégalitaire des filles et des garçons dans ces familles semble légitime, il s’avère également que cette condamnation est parfois portée par des discours racistes qui tendent notamment à présenter les hommes maghrébins comme des individus nettement plus machistes que les hommes dits « français » et les femmes maghrébines comme des victimes soumises et passives. Or, si l’on porte attention à la réalité des inégalités entre les sexes dans l’ensemble de la société, la validité de ces discours se trouve nettement relativisée. Ajoutés aux discriminations subies dans l’accès à l’emploi, au logement, aux loisirs, etc., ces discours forment un contexte social dont la prise en considération est indispensable à la compréhension des pratiques des descendantes de migrants du Maghreb au regard du principe de virginité. Les entretiens conduits auprès de ces jeunes femmes, lors d’une enquête qualitative sur les modes de gestion des risques d’infection par le VIH, révèlent que si certaines condamnent et transgressent cette norme, d’autres la respectent et en prônent la valeur. Mais quels que soient le point de vue exprimé et les stratégies adoptées, les discours qu’elles produisent sur leurs pratiques amoureuses et leur vie sexuelle sont sous-tendus par le rejet commun de la stigmatisation raciste d’une part et de la domination de genre d’autre part.