Démographie et médecine du travail
Démographie et médecine du travail : à quoi servait la Fondation
Carrel ?
Discutant : Patrice Bourdelais (EHESS).
Spécialité traditionnellement dominée, la médecine du travail a été négligée par les historiens du social et des populations. À partir de la Première guerre mondiale, elle s’est pourtant construite en France en articulation étroite avec le natalisme : faute d’un nombre jugé suffisant de naissances, elle entendait optimiser l’affectation de la main-d’œuvre dans les entreprises par une « orientation biologique ». La médecine du travail a de ce point de vue constitué l’application institutionnelle la plus consistante de l’eugénisme à la française.
La profession connaît son heure de gloire dans les années 1930
avec la formulation d’un programme et l’émergence d’une élite.
C’est le régime de Vichy qui va récupérer l’ensemble. Après avoir
rendu obligatoires les services médico-sociaux dans les usines, il
entend donner à la médecine du travail une place institutionnelle
centrale, dont le pivot est la Fondation française pour l’étude des
problèmes humains, dite Fondation Carrel. L’ exposé permettra de
relire l’histoire de cet organisme, connu de nos jours comme
l’ancêtre de l’INED. Au-delà, il s’agira, sur la base des archives
largement inédites de la profession, de porter un regard historique
sur les obstacles rencontrés par l’organisation en France de la
santé au travail, dont la tragédie de l’amiante a rappelé la
gravité.