Démocratisation à l’école de Dakar : des promesses ambitieuses, des résultats plus nuancés

the Monday 12 June 2006 at l'INED.

Discutant : François Roubaud (DIAL)

Au Sénégal, et malgré de réels progrès, la scolarisation primaire n'est pas généralisée et montre même des signes d'essoufflement depuis les années 90. La crise des années 1990, est très souvent invoquée pour justifier de l'inversion des progrès scolaires. Mais elle n'a probablement que « dévoilé l'existence d'inégalités - notamment sociales - largement préexistantes » (Proteau, 2002). La constante réaffirmation par l'Etat du droit à l'éducation pour tous incite, de fait, à s'interroger sur la diffusion des progrès scolaires dans les différents couches de la société.
La démocratisation de l'enseignement fait l'objet de recherches récurrentes dans les pays développés (Merle, 2000) mais elle n'a en revanche suscité que peu d'intérêt de la part des chercheurs africanistes. De fait, « la pertinence de la question n'est probablement pas ressentie dans des pays où l'accès même à l'enseignement primaire est encore loin de concerner tous les enfants » (Pilon et Wayack, 2003). Largement présumées, les inégalités sociales ne sont pas mesurées : mis à part le sexe, parfois l'âge des élèves, les statistiques produites par le ministère de l'éducation nationale restent muettes sur les caractéristiques familiales des élèves. Ces données, de nature transversale, ne permettent que rarement de reconstituer les trajectoires scolaires des élèves.
Les études françaises sur la démocratisation se sont souvent focalisées sur la seule origine sociale des élèves (Duru-Bellat et alii, 2001). Une telle définition ne va pas de soi dans le contexte sénégalais : bien que toujours inférieur à celui des garçons, le nombre des filles scolarisées, n'a cessé de croître, à tous les niveaux du système, et y compris dans la capitale. Ces progrès sont-ils nécessairement et uniquement le fait des familles dotées socialement et scolairement ? Étudier les inégalités de sexe dans les carrières scolaires nécessite de pouvoir en prendre toute la mesure, or les statistiques scolaires s'avèrent, le plus souvent, très insuffisantes.
Ce travail entend ainsi retracer, à partir des résultats d'une enquête biographique menée en 2001 à Dakar, les grandes lignes des évolutions des parcours scolaires (accès à l'école, durée de la scolarité et niveau atteint) ; ainsi que l'ampleur, la constance et/ou le déplacement des inégalités sociales et de genre, sur le long terme.