Combien d'interruptions de grossesse en France ?

La loi de 1975 qui a autorisé l’avortement en France a aussi rendu obligatoire le remplissage d’un bulletin pour chaque interruption volontaire de grossesse ; l’INED est responsable de la publication de ces bulletins depuis 1976. Après une hausse des enregistrements jusqu’en 1981 (181 000), le nombre de bulletins a baissé entre 1984 et 1986 (168 000), pour rester stable jusqu’en 1997. Leur saisie, interrompue après 1997, a été effectuée récemment pour 2002 : on compte 131 000 bulletins cette année-là.

Pour C. Blayo de l’INED, les bulletins souffriraient d’une sous-déclaration importante. Elle estime qu’il y aurait eu environ 250 000 interruptions provoquées en France en 1976 ; leur chiffre aurait baissé au début dès années 1980 et se serait stabilisé au environ de 220 000 jusqu’en 1997.
Depuis le milieu des années 1990, la Direction de la Recherche, des Etudes, de l’Evaluation, et des Statistiques (DREES) du Ministère de la santé s’appuie sur les statistiques hospitalières (SAE et PMSI) pour produire le nombre annuel d’IVG en France. D’après ces sources, il y aurait eu environ 180 000 IVG en 1995, et 206 000 en 2002.

Ces divergences posent de nombreuses questions. Les statistiques hospitalières sont-elles sous-déclarées? Les estimations de l’INED sur-évaluées ? Les IVG ont-elles réellement diminué au cours des années 1980 comme le suppose les estimations INED? La hausse des IVG dans les statistiques hospitalières depuis le milieu des années 1990 correspond-t-elle à une augmentation réelle? Nous tentons ici de répondre à ces différentes questions en nous basant sur une analyse comparée des bulletins et des statistiques hospitalières d’une part, et sur une enquête qualitative auprès de 27 praticiens de l’IVG dans trois régions de France d’autre part.