Une mortalité infantile plus élevée en France que chez ses voisins

Press release Published on 20 March 2025

Alors que l’espérance de vie progresse et que la mortalité des plus âgés recule, notre pays connaît une stagnation préoccupante de la mortalité infantile. En 2022, la France apparait comme le 23e Etat sur les 27 au sein de l’Union européenne en termes de mortalité infantile, un indicateur clé de la qualité des soins périnatals et des politiques de santé publique, une chute marquée par rapport aux années 1990, où elle figurait parmi les pays les mieux classés. L'analyse de Magali Barbieri, Directrice de recherche à l’Ined, publiée dans la Conjoncture démographique de l’Ined, met en évidence cette tendance et interroge les implications sur les politiques de santé publique.

Une mortalité infantile qui ne diminue plus

Longtemps un modèle en matière de santé périnatale, la France voit aujourd’hui sa position reculer de façon inquiétante. Alors que la tendance demeure à la baisse chez ses voisins européens, la mortalité infantile stagne dans l’Hexagone. En 2022, le taux de mortalité infantile (mortalité pendant la première année de vie) atteignait 4,5‰ chez les garçons et 3,7‰ chez les filles pour toute la France (4,3‰ et 3,6‰ en France métropolitaine), contre respectivement 3,5‰ et 3,0‰ en moyenne dans l’UE27. Une douzaine de pays européens affichent désormais des taux inférieurs à 3‰ (figure ci-dessous). En comparaison, la Suède affiche un taux de mortalité infantile de 2,5‰, soit presque deux fois inférieur à celui de la France. En l’espace de trente ans, la situation française s’est significativement dégradée. En 1990, la France était en tête du classement européen pour la survie des enfants. Vingt ans plus tard, elle occupait encore le 8e rang pour les garçons et le 10e rang pour les filles. En 2022, elle chute respectivement aux 24e et 22e places. Cette évolution est principalement due à une mortalité infantile qui ne diminue plus.

Une situation qui interroge

Si la France affiche de meilleurs résultats pour la mortalité des 15-25 ans, la stagnation du taux de mortalité infantile soulève des interrogations. Si une étude récente suggère que des changements de définition concernant les naissances vivantes ont pu en partie contribuer à cette évolution défavorable, il semble que d'autres facteurs soient également en cause. Facteurs médicaux et état de santé des mères, inégalités territoriales et sociales d'accès aux soins, qualité de la prise en charge : plusieurs hypothèses doivent être explorées pour comprendre et enrayer cette évolution. Paradoxalement, les progrès récents de la néonatalogie pourraient aussi contribuer à expliquer la stagnation de la mortalité infantile, qui est essentiellement due à l'augmentation de la mortalité pendant la première semaine suivant la naissance. L’amélioration de la prise en charge des grands prématurés permet à certains nouveau-nés de survivre quelques heures ou jours avant de décéder, alors qu'ils auraient auparavant été considérés comme mort-nés, augmentant ainsi mécaniquement le nombre de décès enregistrés sans pour autant refléter une dégradation des soins.

Comme l’indique Magali Barbieri, Directrice de recherche à l’Ined : « Cette stagnation de la mortalité infantile en France contraste avec les progrès observés ailleurs en Europe et pose un véritable défi pour notre système de santé. »

L’Ined poursuit ses travaux afin d’analyser ces dynamiques et d’éclairer les décideurs sur les mesures à prendre pour améliorer la situation.

À propos des données

L’étude s’appuie sur plusieurs sources statistiques : l’INSEE pour les données françaises, Eurostat pour les comparaisons européennes, et la Human Mortality Database (HMD) pour des séries longues harmonisées sur 41 pays. Les données d’Eurostat, bien que précieuses, manquent parfois de détails, justifiant le recours à l’INSEE et à la HMD. Les séries de l’INSEE proviennent du Bilan démographique et de la Situation démographique de la France, tandis que la HMD assure une comparabilité optimale des indicateurs grâce à des méthodes harmonisées.