Recent demographic trends in France (2024)
Une position singulière dans l’Union européenne
Comme chaque année, la revue Population publie un article consacré à l’évolution démographique récente de la France. L’année 2023, la plus récente disponible, est marquée par un vieillissement de la population et un ralentissement de l’accroissement démographique, en lien avec la baisse du nombre de naissances. Nous avons choisi cette année de mettre en perspective la dynamique démographique de la France avec celle des pays de l’UE27.
La France, plus jeune que la moyenne européenne, mais vieillissant plus vite
Au 1er janvier 2024, la France comptait 68,4 millions d’habitants, soit 230 000 de plus qu’au 1er janvier 2023. Durant l’année 2023, les naissances comme les décès ont diminué très fortement par rapport à 2022 (respectivement de 6,6 % et 6,5 %). En 2023, le solde naturel a atteint un niveau historiquement bas depuis l’après-guerre, légèrement inférieur à 50 000 personnes pour la France entière et autour de 25000 personnes seulement pour la France « métropolitaine ».
Depuis 2018, le solde migratoire dépasse le solde naturel et s’est installé comme le principal moteur démographique de la France, deuxième pays le plus peuplé de l’UE27 derrière l’Allemagne. L’accroissement de la population en France (3,4 ‰) reste cependant inférieur à celui de la moyenne de l’UE27 (3,7 ‰). En effet, même si la France fait partie des rares pays de l’Union européenne dont le solde naturel est positif, son solde migratoire est relativement faible, en valeur absolue et, plus encore, relative. En 2023, 15,2 % de la population de l’UE27 habite en France, soit un peu moins qu’en 2022. Cette part varie fortement avec l’âge des individus.
Taux d’accroissement de la population des pays de l’UE27 en 2023
Source : Eurostat
Lecture : La population de la France en 2023 a augmenté de 3,4 habitants pour 1000 habitants
Enfin, le vieillissement de la France s’accentue, principalement du fait du rétrécissement de la base de sa pyramide des âges (en lien avec la diminution des naissances). Au 1er janvier 2024, les moins de 20 ans représentent 23 % de la population, à peine plus que les plus de 65 ans (22 %). Dans l’ensemble, la France est un pays un peu plus jeune que la moyenne de l’UE27, mais qui vieillit plus rapidement. Les pays les plus âgés de l’UE27 se situent au Sud (Espagne, Italie et Portugal) et à l’Est (Bulgarie et Finlande), tandis que les plus jeunes sont l’Irlande et quatre pays peu peuplés (Luxembourg, Slovénie, Malte et Chypre).
Taux d’accroissement migratoire (à gauche) et naturel (à droite) des pays de l’UE27 en 2023
Source : Eurostat
Lecture : La population de la France en 2023 a augmenté respectivement de de 2,7 habitants et 0,7 habitant du fait des flux migratoire et naturels
La France, 5e en flux migratoires dans l’UE27, mais 21e rapportée à sa population
En France, la part des personnes nées à l’étranger est de 13,1 %, très proche de la valeur moyenne dans l’Union européenne, mais nettement inférieure à la proportion observée en Allemagne, en Autriche, en Suède, en Belgique ou encore en Irlande (entre 19,4 et 21,8 %), le record étant détenu par le Luxembourg (50 %). Cette proportion varie fortement avec l’âge, en lien avec l’histoire migratoire plus ou moins récente des différents pays.
En 2022, année la plus récente pour laquelle on dispose de statistiques, les flux d’entrées de ressortissants de pays tiers (pour lesquels un titre de séjour est obligatoire pour résider en France) ont augmenté par rapport à 2021 et atteignent le niveau le plus élevé depuis 2000 (282 957 personnes). La structure de ces flux migratoires a relativement peu changé en un an, que ce soit pour la répartition par âge, par continent d’origine, par sexe ou par motif de délivrance des premiers titres de séjour. Toutefois, 2022 est marquée par une augmentation conséquente de la part des flux pour raisons professionnelles (+ 4 points) et par une féminisation de ces derniers (+ 15 points). La part des demandeurs d’asile est pour sa part en baisse (3167 en moins). La France est le 5e pays de l’UE27 pour le nombre de personnes migrantes accueillies (un peu plus de 5 % des flux d’immigration en provenance de tous les pays, y compris ceux de l’UE27), loin derrière l’Allemagne et l’Espagne qui concentrent à elles deux 52 % des flux. Mais la hiérarchie est très différente lorsque l’on rapporte ces flux à la population totale du pays : dans ce cas, la France occupe la 21e place de l’Union européenne (elle se trouve donc parmi les pays qui accueillent le moins de réfugiés proportionnellement à leur population).
Une baisse historique de la fécondité rapprochant la France des pays d’Europe de l’Ouest et du Nord
En 2023, 678000 enfants sont nés en France, soit 48000 de moins qu’en 2022. Le nombre de naissances diminue essentiellement du fait de la baisse de la fécondité (plutôt que d’une baisse du nombre de femmes en âge d’avoir des enfants) : l’indice conjoncturel de fécondité est légèrement inférieur à 1,67 enfant par femme en 2022 (1,64 en France métropolitaine, niveau le plus bas observé depuis l’après‑guerre). La baisse concerne tous les groupes d’âges et semble devoir être reliée à une augmentation de la part des femmes sans enfant à tous les âges, quel que soit le niveau d’études, signe d’un report des naissances ou de l’augmentation de l’infécondité désirée. En 2023, le profil de la fécondité par âge en France est proche de celui observé dans les pays d’Europe de l’Ouest et du Nord, plus tardif que dans les pays baltes et de l’Est de l’Europe, mais plus précoce que pour ceux du Sud. Malgré la baisse de sa fécondité, la France reste parmi les pays les plus féconds d’Europe : elle se place au 2e rang pour la fécondité du moment, derrière la Bulgarie, et au 1er rang pour la génération 1985, juste devant l’Irlande. C’est aussi en France que la fécondité hors mariage est la plus élevée en Europe (65,2 %, soit trois fois plus qu’en Grèce, qui a le niveau le plus faible). Dans 8 pays, cette proportion diminue entre 2012 et 2022, et elle est même divisée par près de deux en Hongrie (de 44,5 % à 25,0 %). Une autre norme évolue (plus lentement, cependant, que celle des naissances hors mariage), celle de la nomination des enfants, puisque 79,5 % des enfants portent uniquement le nom de famille de leur père, contre 83,0 % en 2014.
Âge moyen à la maternité (à gauche) et indicateur conjoncturel de fécondité (à droite) des pays de l’UE27 en 2022
Source : Eurostat
Lecture : l’âge moyen à la maternité en France en 2022 a été de 30,0 ans et la fécondité dans les conditions de l’année 2022 a été de 1,79 enfants par femme
Un des taux de recours à l'avortement les plus élevés d'Europe avec la Suède
En 2023, le nombre d’avortements augmente pour la deuxième année consécutive, avec 242000 interruptions volontaires de grossesse (IVG) en 2023 contre 232000 en 2022 et 216000 en 2021. Le ratio de 1 IVG pour 3 naissances est désormais dépassé. Les taux d’IVG augmentent à tous les âges, mais tout particulièrement entre 20 et 39 ans. On revient progressivement à la situation d’avant la crise sanitaire. Les IVG médicamenteuses représentent près de 8 avortements sur 10. Contrairement aux IVG, le nombre des interruptions médicales de grossesses (IMG) diminue entre 2022 et 2023, comme entre 2021 et 2022. Les IMG ont lieu à des âges plus avancés que les IVG, en lien avec l’augmentation des grossesses à risque. Si on rapporte ces chiffres au nombre de femmes de 15 à 49 ans, la France est, avec la Suède, le pays où le taux de recours à l’avortement est le plus élevé d’Europe (plus de 15 pour 1 000 femmes âgées de 15 à 49 ans), sans comparaison avec les 0,1 ‰ en Pologne et les taux inférieurs à 7 ‰ observés dans 11 autres pays. Cependant, ces comparaisons européennes s’appuient uniquement sur les données officielles des IVG ; or, dans certains pays aux législations plus restrictives, de nombreux avortements sont pratiqués clandestinement. Et, comme nous le montrons, les réglementations sur l’avortement varient fortement d’un pays à l’autre.
L’âge moyen au mariage continue de s’élever, la France se rapproche des pays du Sud et de l’Ouest de l’Europe
Le nombre de mariages augmente très légèrement en 2023 (242 000), prolongeant le rattrapage des mariages non célébrés en 2020. Ce rattrapage n’est toutefois que partiel. La tendance est similaire pour les pacs, qui augmentent très légèrement en 2022 (dernière année pour laquelle les données sont disponibles). Dans les deux cas, la part des couples de même sexe reste relativement stable (2,9 % des mariages et 4,9 % des pacs), même si les pacs entre deux personnes de même sexe n’ont jamais été aussi nombreux (10350 en 2022 contre 6 900 mariages). Parmi les couples de même sexe ayant formalisé leur union (par mariage ou pacs), ce sont les femmes les plus jeunes qui choisissent le plus souvent le mariage, et les couples de femmes représentent 55 % des mariages homosexuels. La propension au mariage n’a jamais été aussi forte depuis 10 ans (585 mariages pour 1 000 hommes et 578 pour 1 000 femmes). L’âge moyen au premier mariage, comme celui observé pour l’ensemble des mariages, continue d’augmenter (respectivement 34,0 et 36,3 ans pour les femmes, 36,0 et 38,7 ans pour les hommes). Envisagée du point de vue des générations, la baisse de la nuptialité est considérable : 68 % des femmes et 63 % des hommes nés en 1972 se sont mariés avant 50 ans, contre 93 % et 88 % dans la génération 1946. Pour les personnes nées en 1987, la valeur devrait être proche de 50 %. Dans ce domaine, la France se rapproche des pays du Sud et de l’Ouest de l’Europe, avec un mariage moins précoce que dans les pays de l’Est. Si le taux de nuptialité et l’âge au mariage reculent partout en Europe, la Hongrie fait figure d’exception, ce qui s’explique par des mesures financières très incitatives, notamment pour les plus jeunes. À l’échelle de l’UE27, 6 pays ne reconnaissent aucune forme d’union entre personnes de même sexe et 5 pays ne reconnaissent que les unions civiles.
Taux brut de nuptialité des pays de l’UE27 en 2022
Source : Eurostat
Lecture : pour 1000 habitants on compte 3,2 mariages en France en 2022
Une mortalité relativement basse aux âges plus élevés par rapport aux pays européens, mais un retard important et croissant pour la mortalité infantile
Le nombre de décès survenus au cours de l'année 2023 est estimé à 631000 pour la France entière, soit 44122 de moins qu’en 2022. En baisse depuis 3 ans, il reste plus élevé que celui observé avant la pandémie (2019), du fait du vieillissement de la population. En revanche, l’espérance de vie en 2023 est supérieure à celle de 2019 : 80,0 ans pour les hommes et 85,7 ans pour les femmes (contre respectivement 79,7 et 85,6 ans en 2019). Le rebond de l’espérance de vie en France en 2023 est toutefois inférieur à celui observé dans d’autres pays d’Europe, même si la France reste dans le tiers supérieur des pays de l’UE, avec un classement bien meilleur pour les femmes (3e rang) que pour les hommes (11e rang). Cependant, comme dans la plupart des pays européens, les progrès concernant l’espérance de vie ralentissent : entre 1999 et 2009, le gain total de durée de vie pour l’UE27 a été de 4,2 ans pour les hommes (2,8 ans en France) et 3,5 ans pour les femmes (1,9 an en France), contre seulement 2,0 ans pour les hommes (même chiffre en France) et 1,2 an pour les femmes (1,1 an en France) entre 2009 et 2019. Pour la période la plus récente, fortement affectée par l’épidémie de Covid‑19 (de 2019 à 2022), la perte dans l’UE27 a été de 0,8 an pour les hommes (0,4 an en France) et 1,0 an pour les femmes (0,4 an en France).
Espérance de vie des femmes (à gauche) et des hommes (à droite) des pays de l’UE27 en 2023
Source : Eurostat
Lecture : l’espérance de vie des femmes en 2023 est de 85,7 ans et celle des hommes de 80,0 ans.
Au sein de l’Europe, la France se situe dans la moitié des pays ayant la mortalité la plus élevée avant 65 ans, et elle est particulièrement mal placée pour la mortalité infantile (23e rang sur 27). La situation est nettement plus favorable au-delà de 65 ans, surtout pour les femmes. L’écart de mortalité entre les hommes et les femmes est plus élevé en France que dans la moyenne européenne, mais il continue de baisser en 2023 : la surmortalité des hommes diminue à tous les âges, malgré le maintien de deux pics à 20-24 ans et à 60-64 ans.
Enfin, la première cause de mortalité en France est le cancer, alors que ce sont les maladies cardiovasculaires en Europe. Toutefois, la mortalité par cancer reste plus faible en France que dans la plupart des pays de l’UE27, tandis que la mortalité liée aux morts violentes est particulièrement défavorable en France.
Taux de mortalité infantile des pays de l’UE27 en 2023
Source : Eurostat
Lecture : Pour 1000 naissances en France en 2023 on enregistre 4 décès de moins d’un an
Online: December 2024